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Les couleurs de la vie
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24 octobre 2017

Faux départ de Marion Messina

faux

 

 

Premier roman de Marion Messina dans cette longue et merveilleuse série des 68 premières fois. 

 

Premier roman qui décrit, dans une écriture rapide, de façon vitriolée, cette société qu’est devenue la nôtre mais surtout celle des jeunes qui tentent de s’en sortir sans trop de casse.

 

 

Aurélie a obtenu son bac à la satisfaction de ses parents. Une nouvelle vie peut commencer : la fac ouvre ses portes. Issue d’un milieu ouvrier, l’avenir semble radieux pour ses parents. Elle part donc vers Grenoble.

 

Malheureusement Aurélie est une fille très solitaire, sans amis et dès le premier jour, elle comprend qu’à la fac, il y  a des castes.  Ceux qui savent qu’ils seront l’élite, et les autres qui se répartissent en sous-groupes. 

 

Ayant obtenu une bourse qui n’est pas assez conséquente, elle décide de travailler en nettoyant les chambres de la cité universitaire. Elle y rencontre Alejandro, étudiant colombien. Grâce à l’argent de son oncle, il est venu en France pour étudier la littérature. Elle lui plait, il lui plait. Aurelie ne quitte plus Alejandro qui commence à s’ennuyer à Grenoble. Il décide de partir à Lyon pour poursuivre son cursus. D’Aurélie, il n’en est pas question ; sa liberté d’homme avant tout.

 

Détestant Grenoble, Aurélie plaque tout et part à Paris. 

 

 

Sincèrement, j’ai cru en lisant les premières lignes que ce roman allait m’ennuyer. Grave erreur car je l’ai lu d’une traite. D’ailleurs Marion Messina ne nous en laisse pas le temps, on court derrière Aurélie, on dévore sa vie. 

 

Aucun ruban rose à ouvrir dans le portrait de cette jeune file du XXIème siècle et ce futur si improbable. Elle aimerait être différente de ses parents sans qu’on lui en laisse l’occasion. 

 

Aucun pathos dans cette lucidité de l’écrivain.  Notre société est malade, c’est un fait.

 

Sans oublier Paris qui prend une bonne claque sur son visage de ville idyllique. 

 

Une très bonne lecture qui vaut le détour. 

 

« La vie nous a semblé difficile parce qu’on essayait d’imiter nos parents, dans une époque qui avait trop changé pour qu’on y parvienne.

On a lutté, étudié, envisagé de passer des concours, on a bêtement voulu faire comme eux…Et on s’est plantés. Il faut inventer autre chose, chercher une place ailleurs, dans d’autres lieux, d’autres corps de métier, d’autres décors. Il faut tout recommencer, Aurélie. Tout. On ne va pas rester ici à s’emmerdre pour une avoir une pâle copie de la vie au rabais de nos vieux. Il va falloir qu’on trouve notre place quand eux avait un parcours tout désigné. Il faut arrêter de se lamenter de vivre moins bien que nos parents. Ils ont connu une époque de plein emploi, tu rentrais dans un magasin acheter de savates et t’étais vendeur de savates le lendemain, tu pouvais devenir VPR sans un seul diplôme…A quoi ça les a menés ce cirque ? Finalement, il n’y a rien à leur envier. Il faut faire le deuil de l’opulence, le deuil de Paris, le deuil de la France, le deuil du plein emploi. Et, surtout, il ne faut plus jamais se laisser marcher sur les pieds. »

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19 octobre 2017

Paysage perdu de Joyce Carol Oates

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C’est avec une certaine pudeur que Joyce Carol Oates évoque ses souvenirs d’enfance et d’adolescence, tout en sachant que certains seront peut être déformés par le temps.

 

Ne vous attendez pas à lire une biographie exhaustive mais de moments donnés dans sa vie;

 

 

Joyce Carol Oates a grandi à Millersport, contrée très pauvre dans l’Etat de New York. Elle y vivait avec ses parents Carolina et Frederic dans une ferme qui appartenait aux beaux parents de Carolina et qui avait accueilli celle-ci quand elle était enfant abandonnée par sa mère qui en fait l’avait confiée à sa soeur.  

 

Dans la pauvreté Joyce Carol Oates a une enfance entourée d’amour même si un peu rude. 

 

Le travail à la ferme ne suffisant pas à faire vivre autant de personnes. Son père Frederic travaillait en usine et en plus de ce travail se faisait un petit pécule en calligraphiant des enseignes destinées aux magasins ou au bord des routes.

 

 

 

L’école c’était une seule classe des plus petits aux plus grands qui tourmentaient les plus jeunes. 

 

Les Oates étaient pauvres mais leurs plus proches voisins l’étaient encore plus. On se doutait que le père ivrogne pratiquait l’inceste mais sans s’en mêler. Jusqu’au jour où toute la famille disparu on ne sait où.

 

Tout était rêverie pour une petite fille dans cette campagne sauvage. Elle se perdait dans les chemins et aimait se faire peur.  Sa première copine se nomme Red Hot, un coq qui accourt vers elle dès qu’elle montre sa silhouette. De coq en fait c’était une poule. 

 

L’été, on installait un étal au bord de la route et la petite attendait les clients pour vendre les légumes et fruits de la ferme. 

 

On suit la longue transformation d’une petite fille dont le livre préféré était Alice aux Pays des merveilles vers celle d’une adolescente qui continue ses études pour atteindre l’Université où elle fera la rencontre de son futur mari.

 

Joyce Carol Oates ne fut pas fille unique. Elle évoque de temps en temps son petit frère mais le chapitre le plus émouvant est celui où nous raconte cette soeur venue au monde quand elle avait 18 ans. Ce fut un accident bienvenu dans la vie de ses parents. Ce fut même l’auteur qui décida de son prénom à la demande de ses parents Lynn Ann. Lynn Ann qui n’était pas comme les autres, une autiste. Ses parents l’elevèrent jusqu’à l’âge de 15 ans avec un amour inconditionnel. Mais lorsqu’elle frappa sa mère, ils comprirent que malheureusement il fallait la placer dans une institution.  

Elle était physiquement le double de l’auteur.  

La lecture de ce chapitre est un véritable hymne d’amour envers ses parents et cette soeur qui n’était pas pareille aux autres. 

 

 

Je pourrais vous parler également des vols en avion de Frederic Oates, de tous les vêtements que Carolina Oates a cousu pour sa fille, des morceaux de piano que jouait Frederic Oates lui qui avait appris le violon dans l’enfance. (Sa mère abandonnée par son mari, aimait lire également), des silences familiaux la famille Oates n’était pas encline à parler pour jacasser, d’une petite fille qui découvrit le pouvoir d’une bibliothèque, d’une adolescente insomniaque et timide, des différents endroits où elle et son mari vécurent. 

 

Joyce Carol Oates ne s’envole pas vers de grandes explications lyriques de son désir d’écrivain. Elle est devenue écrivain.

 

Paysage perdu évoque un univers qui a disparu restant dans la mémoire par clichés fugitifs. Quel bonheur cette lecture ...

 

17 octobre 2017

Imago de Cyril Dion

imago

 

68

 

Enfin un vrai coup de coeur dans cette édition d’automne des 68 premières fois.  On me dira que mes coups de coeur ne sont pas très gais mais tout me plait dans ce roman, l’écriture, les personnages, le thème.   Lu sans m’arrêter dès la première ligne. 

 

 

Imago nous ramène dans notre société contemporaine à travers les enjeux palestiniens et israéliens, les calculs de probabilité du FMI, le terrorisme, l’amour que l’on recherche à tout prix, l’enfant qui manque.  Rien de très réjouissant et pourtant c’est notre réalité en ce XXIme siècle qu’on le veuille non . A nous d’effectuer notre Imago comme les personnages du roman.

 

 

Nadr et Khalil son frère vivent en Palestine. Ils ont poussé au milieu de la haine et les enfants qui naissent après eux ne connaissent également qu’un pays tenu dans une pauvreté absolue. Ce qui fait le bonheur du Hamas. Khalil en fait d’ailleurs partie car en lui il n’y a pas d’amour mais de la Haine envers l’Occident, envers les juifs etc. Nadr lui ne participe pas à tout cela, il fume ses joints, lit de la poésie, se laisse porter par les nuages. 

 

 

De l’autre côté de la planète, Amandine s’est exilée dans la forêt. Elle ne veut plus vivre au milieu de cette Société. Maman de trois enfants, elle garde les leurs d’enfants quand ils le désirent.  Bonne mère, elle ne l’a jamais été comme si ces bébés devenus grands l’emprisonnaient dans un carcan non voulu.

La blessure qu’elle porte en elle, c’est cet enfant qui lui a été enlevé à la naissance par le père et emmené en Palestine. Elle a tout fait pour le retrouver jusque, à faire le voyage là  bas où on la rejetée lui signifiant qu’elle n’était aucunement la bienvenue. 

 

Fernando travaille pour le FMI. Il aime les colonnes établies de chiffres qui déterminent  comment on peut aider tel ou tel pays avec les efforts à réaliser pour répondre à cette aide. Il ne comprend pas comment les autres qu’il croise dans le métro peuvent vivre comme des mollusques dans une petite vie minable. Son evasion, la lecture de Fernando Pesoa. L’homme qui a tout compris.

Il déteste son nouveau chef et ne veut pas entendre parler de la Palestine. Pourtant le dossier lui est dévolu. 

 

 

Khalil ne porte que la haine en lui. Il crache même à Nadr qu’il n’est qu’un renégat puisque sa vrai mère était française. L’Occident coupable de tous les maux de la Palestine  Khalil décide d’agir. Il s’en va sur cet autre continent qui tue leurs frères. 

Nadr décide de partir lui aussi pour empêcher khalil de se tuer au nom pas d’un Dieu mais des désidératas de ceux qui ont le pouvoir.

 

 

Nadr c’est la liberté, l’espoir, l’envie de changer ne fut ce qu’un moment infime la route du destin. Pour lui également j’ai eu un gros coup de coeur. Il est tour à tour enfant, naïf et pourtant aucunement dupe de l’hypocrisie sociétale qu’on nous martèle à longueur de temps. Et puis, il lit des poèmes au milieu de rien. Comment ne pas l’aimer ?

 

 

 

 

 

Cyril Dion a réalisé et écrit le film « Demain ». 

 

16 octobre 2017

Ces rêves que l'on piétine de Sebastien Spitzer

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68

 

 

Défaite des allemands. Ils sont en train de perdre cette guerre qui aurait fait vivre la civilisation aryenne aux confins du monde.

 

A Berlin, Magda Goebbels doit se rendre dans le bunker, c’est là qu’Hitler a établi son quartier général pour échapper à la destruction de Berlin. Ses enfants, sont déjà là bas. Elle y retrouve également Speer, cet ami d'Hitler qu'elle déteste. 

 

Dans les camps, c’est la débandade, les allemands deviennent de plus en plus cruels. On trimballe, enfin ce qu’il en reste de ces fantômes d’un camp à l’autre. Certains décident de s’enfuir dont le dénommé Judah.  Dans leur fuite, ils entrainent une femme et une enfant qui ne parle pas. Cette femme fit partie de celles choisies pour se prostituer auprès des allemands dans les camps. Mieux traitées mais haies par les autres femmes. Elle a réussi a sauver ce bébé né en captivité, son bébé, et lui a appris à se taire afin qu'on s'imagine qu'elle n'existe pas. 

 

Sans oublier une sacoche qui doit absolument être préservée. Tout ce qui reste de l’âme d’un pauvre homme décédé dans le camp. La sacoche contient une longue lettre à sa fille. 

 

 

 

En parcourant ce livre, il ne faut pas oublier que c’est un roman qui nous raconte le terrible secret de Magda Goebbels : elle fut élevée par un beau père juif. De ce fait avéré, Sebastien Spitzer en a créé  cette histoire émouvante et plus que troublante. 

 

Ce livre est fascinant par son sujet : comment Magda Goebbels élevée avec amour par un juif a t’elle pu sombrer du côté obscur ? Devenir l’adulatrice de Hitler et zappé de son âme le sort des juifs ? Car elle, elle savait bien entendu.  L’ambition ne peut être que la réponse.  Une égérie du nazisme portant le nom d’un juif, impensable. Elle l’a d’ailleurs bien caché. Et son mari ? Ce pantin répugnant l’a t-il découvert ?

 

 

Durant la lecture, je n’ai pu m’empêcher de penser à l’affaire Weinstein. Goebbels faisant autorité sur les jeunes actrices avec l’accord de sa femme.  Car je pense que ce fait ne devait pas être une fiction. 

 

 

Magda Goebbels et son mari comme tous les monstres qui ont en commun la lâcheté, se sont donné la mort après que leur chef vénéré ait accompli le même geste.  Ils ont emporté leurs enfants avec eux. Enfants dont la première lettre du prénom était un H.  L’ainé Harald ne faisait pas partie du lot, enfant d’un autre mariage de Magda. Il participait comme pilote à la guerre. 

 

 

Un premier roman mais quel premier roman !  

 

 

 

12 octobre 2017

Et soudain, la liberté de Caroline Laurent et Evelyne Pisier

liberté

68

 

Et soudain la liberté, quoi de plus beau que le mot liberté dont des milliers de femmes sont encore privées dans le Monde.

Avant de vous parler de mon ressenti à la lecture de ce roman entre guillemets, je vous avouerai que le nom de Pisier était associé pour ma part à celui d’une actrice Marie-France. Femme que j’adorais et adore toujours mais de sa soeur Evelyne j’en avais peut être entendu parler mais je n’en suis pas si sûre. 

 

Les jeunes filles de Belgique et France, imaginent-elles pour la plupart, que la génération de ma mère, née durant la guerre, était privée de beaucoup de liberté. Nos deux pays étant régi par le code Napoléon, la femme ne pouvait ouvrir un compte en banque sans l’accord de son mari, ni travailler sans le même accord. Elles étaient éduquées comme l’a été ma mère, pour être de bonnes mères de famille. 

 

Les jeunes filles savent-elles que même dans nos pays européens la liberté des femmes n’est pas la même. En Allemagne, les jeunes mères ne bénéficient pas des crèches comme dans nos deux pays. Donc si personne ne sait garder en privé les jeunes enfants, les femmes doivent arrêter de travailler jusqu’au moment où leurs enfants sont en âge de rentrer au jardin d’enfant. 

 

Cette liberté nous femmes que nous possèdons même si l’égalité n’est pas encore totale entre les deux sexes, elle nous a été offerte par le combat de femmes telle que Mona dans le roman.

 

 

Mon vit en Indochine avec son mari André, fervent admirateur de Pétain et Maurras. Leur petite fille Lucie est choyée dans ce pays. Mona mère au foyer est belle et adore son mari.

 

Est-ce le jour où elle fut enfermé dans un camp tenu par les japonais, violée par eux, répétant à Lucie qui avait faim qu’elle mange de l’herbe, que l’étincelle de la liberté à pris feu ?

 

De son viol, elle en gardera le secret et ne l’avouera jamais à son mari.

 

Une rencontre, une simple rencontre peut apporter tant de changement dans une vie. Marthe, une bibliothécaire, va lui tendre le livre « le deuxième sexe ». Mona va comprendre que sa vie est tellement régie par le désir des hommes de maintenir les femmes dans un carcan, qu’elle va décider de tout changer. Acheter un pantalon, apprendre à conduire et conduire seule sans chauffeur, prendre un amant. Scandale dans la colonie de Nouméa où ils vivent à présent avec Lucie et Pierre.

 

Elle veut le divorce. Avec rage son mari lui accorde.

 

Elle part seule avec ses deux enfants. Elle veut que Lucie vive libre, fasse des études. Pas la même vie surtout pas.

 

Quand Lucie apprend que sa mère va se remarier avec leur père, elle est interloquée, elle ne comprend pas.

 

Mona attend à nouveau famille. André n’en veut pas et l’oblige  à se faire avorter. Vengeance d’homme. 

 

Mona repart en France avec fille et fils et là sa nouvelle vie va débuter. Elle va se battre pour la liberté de toutes les femmes, pour la liberté de sa fille qui elle aussi très jeune devra avorter. 

 

 

Lucie vivra libre. Lucie qui est en fait Evelyne Pisier. Lucie qui vivra l’amour avec Fidel Castro. Lucie sera libre. 

 

Ce livre est la rencontre en premier lieu entre une jeune éditrice Caroline Laurent et Evelyne Pisier. 

Rencontre à travers le manuscrit de ce roman qui devait évoquer la vie de la mère d’Evelyne.

Malheureusement  l’auteur est décédée avant de l’avoir terminé et c’est Caroline Laurent qui a pris la relève en hommage  à cette amitié entre une jeune femme et une dame d’un certain âge. L’amitié ne connait pas de frontière. Elle se crée par une alchimie infinie. C’était toi et moi. Il n’y a pas d’explications.

 

 

Ce livre a deux facettes. Il y’a la vie romancée de la mère Mona et de Lucie la fille mais également le ressenti de cette jeune éditrice qui s’est attelée à cette tâche. A travers ses mots, elle dresse le portrait d’Evelyne Pisier et se dévoile un peu dans sa sensibilité.

 

Ce livre est un hommage à la liberté de toute femme. La liberté n’est jamais acquise dans le temps. Un livre qui vous rappelle qu’il faut toujours se battre et se battre encore pour ne rien perdre dans ce monde qui se délite. 

 

Et suprême bonheur, tout à la fin, Marie France est évoquée. Elle ne fait pas partie du roman car Evelyne Pisier en avait décidé ainsi, par respect pour sa soeur qu’elle adorait. 

 

« Reste la peur de blesser, de tomber à côté de la plaque. De ne pas réussir à dire, non pas qui était Evelyne Pisier, mais ce que mon esprit et mon coeur ont fait d’elle à travers ce roman. Cette peur, j’y réponds à la maison par une panique qui me conduit parfois, chose inquiétante, à rire et à pleurer en même temps. Oui, j’ai peur, peur du jugement, du mépris, des mauvaises interprétations. Peur surtout que le livre, ne soit pas exactement celui dont elle aurait rêvé. Elle m’aurait répondu qu’aucun ne peut l’être. Alors je continue. Je vais au bout de ma promesse »

 

 

Vous pouvez être rassurée Caroline Laurent, où qu’elle soit Evelyne Pisier est certainement fière de vous. Votre roman est de celui qu’on n’oublie pas et que l’on referme avec une petite étincelle dans le coeur.  

 

 

 

 

 

 

 

 

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9 octobre 2017

N'écrire pour personne de A.L. Snijders

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A.L. Snijders de son vrai nom Peter Cornelis Muller vit aux Pays Bas, retraité de l’enseignement, il a décidé à soixante quatre ans d’écrire des Zeer Kort Verhaal (de très petites histoires en français). 

 

Une petite histoire qui ne dépasse pas une page et qu’il envoie à ses enfants ou ses proches. Une petite histoire écrite en une demi-heure et à laquelle il ne change rien.

 

Et c’est un véritable régal. 

 

Snijders décrit avec causticité la vie des Hollandais, de sa famille. Il évoque des souvenirs de jeunesse. On apprend qu’il aime le camping. Il nous parle de ses écrivains préférés, de ces cinq livres qu’il lit en même temps qui trainent sur sa table de nuit. Il s’amuse avec tendresse des petits mots de ses petits enfants. Il nous explique les réunions de poètes.  Il y a des poèmes également. Pouchkine, Jules Renard, des peintres. 

 

 

 

Un livre à lire et relire.

 

 

« Je ratisse des feuilles dans mon jardin. Huit poules se promènent autour de moi, elles becquettent des vers et des larves. La scène n’impressionne pas. Ce qui m’impressionne, c’est de se voir tenir à la poupe d’un navire et de regarder les mouettes vous survoler et suivre votre sillon. Cependant, c’est très bien ainsi. »

 

 

« En 1968, Yasunari Kawabata est surpris de recevoir le prix Nobel de littérature. Quant tout le monde, est parti, il écrit un haïku.

 

Plaine d’automne;

Une clochette;

On ne voit pas celui qui passe. « 

 

« Quand j’étais jeune, j’allais faire de la voile sur les lacs de Hollande-Méridionale, mais je me demandais toujours pourquoi je le faisais. J’avais le pressentiment que faire de la voile n’avait aucun sens - vous n’allez nulle part. Je ne pouvais pas continuer à me mouvoir ainsi dans un monde fait simplement d’allers-retours, j’avais besoin d’une destination à atteindre. Maintenant, que je suis âgé, je fais de la voile sur le lac Ketelmeer et plus rien ne me dérange (en dehors du fait que la vie est très chère). »

 

3 octobre 2017

La dent du serpent de Craig Johnson

longmire

 

Je l’oublie parfois Longmire mais quand je le retrouve, bonheur total.  

 

 

Dans la maison de Barbara sévit un lutin. Elle laisse une liste des choses à réaliser dans la maison. Quand elle revient tout est en ordre et l’assiette laissée avec les gâteaux bien en évidence est dévorée.

 

Longmire lui ne croit pas aux fantômes alors il organise la planque avec son équipière Vic qui est devenue non sa compagne mais sa maitresse. 

 

Le lutin est un jeune garçon qui s’empresse de s’enfuir après avoir  boxe le nez de Vic.

 

Mais Longmire a la dent dure et retrouve le jeune garçon  par pur hasard avouons-le. 

 

Ledit gamin a peur et récite des versets de la bible. Apparemment il fait partie des mormons.  Disons plutôt d’une secte des mormons.

 

Secte qui se dissémine dans beaucoup d’Etats avoisinants apparemment. Secte dont le camp est fermé par des grillages et cerné de miradors. Etrange. 

 

Après quelques tentatives de fuite, le gamin décide de rester calme et de travailler pour la communauté.  Fait suprenant, il ne sait pas ce que c’est qu’une tv et il se prend d’amour pour le film mon amie Flycka. Pour ceux qui ne connaissent pas cette série, Flycka est un cheval. 

 

Bon Longmire au travail, faut démêler tout cela. 

 

 

 

Dans ce nouveau roman, on retrouve bien entendu l’Ours ami de toujours de Longmire, Vic la râleuse, un homme étrange qui prétend qu’il est un homme mort il y a deux cent ans, une maman introuvable, toute une famille vivant dans des sectes, du pétrole, des poursuites, des fusils, du feu, un poignard. Et Longmire toujours aussi loquace et sentimental. 

 

 

 

 

 

3 octobre 2017

Entre eux de Richard Ford

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De nos parents, nous ne connaissons pas grand chose. Les souvenirs de leur jeunesse qu’ils éparpillent au fil des conversations. Des photos sourire classées dans des albums. Visages familiers sur le fil de la vie.  Nous faisons partie d’eux car ils nous ont légué leur ADN, une partie de leur caractère, parfois leurs angoisses ou leurs rires.  Mais leurs plus tendres pensées nous resteront toujours des inconnues même si parfois ils se confient.  

 

Richard Ford a écrit sur sa mère après son décès, il y a de cela plus de trente ans. 

Trente ans après, il réunit ses parents dans une même histoire. 

 

Edna et Parker se sont rencontrés à Hot Springs. A l’époque il était épicier pour accéder plus tard au métier de voyageur de commerce d’amidon. 

 

Edna et Parker se marièrent et vécurent pendant 15 ans à deux, sur les routes. Ils ne se quittaient jamais, logeant dans des hôtels où les menait le métier de Parker. 

 

Parker était issu d’une famille irlandaise. Frères et soeurs mais la mère protégeant son gamin n’aimât jamais sa belle fille.

 

Du côté d’Edna, elle fut la fille d’une jeune mère qui s’en débarrassa vite en la faisant grandir chez les soeurs.  Sa mère retrouva un homme et comme Edna était en âge de travailler, elle fut invitée à revenir à la maison. C’est pourtant de ces deux personnes qu’Edna et Parker reçurent le plus d’amour familial.

 

Quinze ans après le début de leur mariage, un bébé voit le jour.

 

Le couple emmène partout avec lui l’enfant mais il faut bien se rendre à l’évidence, Parker va devoir faire sa tournée seul à présent. Du lundi au vendredi mère et fils resteront en duo jusqu’à la formation du trio le vendredi soir. Richard Ford conserve le bonheur que ses parents avaient de se retrouver. Son père et sa mère souffrirent -ils de cette situation de séparation ? Surement mais jamais ils ne le montrèrent à leur enfant. Richard compris pourtant très vite qu'il y avait eux et lui mais sans en souffrir car Edna et Parker aimaient leur fils. 

 

Parker meurt malheureusement à l’âge de cinquante cinq ans d’une crise cardiaque. 

 

Richard Ford est adolescent. Edna adore son fils mais lui fait bien comprendre qu’elle sera toujours là pour lui mais qu’il doit apprendre à se prendre en charge. Elle aura sa vie et il aura la sienne. Il est hors de question qu’il continue à devenir un petit voyou.  Ils ont chacun besoin l’un de l’autre mais dans un contexte de confiance.

 

 

Ils vont donc mener leur vie tout en se voyant très souvent. Edna ayant de nombreuses amies, des sorties, des voyages. 

 

Richard lui va vivre sa vie d’étudiant. Rencontrer la femme de sa vie. Sa mère étant toujours la bienvenue chez eux.  

 

Et puis un jour le cancer fait son apparition. Edna va vivre durant quelques années avec cette épée de Damoclès jusqu’au jour où la maladie sera la plus forte. 

 

 

 

Si vous attendez à travers ce livre que Richard Ford vous explique pourquoi il est venu à l’écriture grâce à ses parents et la vie qu’il a menée, silence total. Il esquisse à peine qu’il est romancier. D’ailleurs sa mère lui demandait quand il allait enfin travailler alors qu’il avait déjà quatre livres à son actif.

 

 

Un livre tout en pudeur et tendresse de parents qui ressemblaient  aux vôtres, aux miens.

 

Très beau portrait de deux personnes dont on entend le rire entre les pages. 

 

 

« Il m’appelait « mon fils », je l’appelais « papa »;les gens disaient que je lui ressemblais. Il n’aurait pas imaginé que soixante-dix ans plus tard je ne me rappelle plus le son de sa voix. »

 

parents

 

 

 

 

« Bien sûr, je la voyais vieillir. Je savais que sa vie n’était guère à son goût, mais qu’elle sauvait les apparences. Parfois elle me prenait à part, le matin, lorsque nous étions seuls, entre adultes, et elle me demandait : « Tu es heureux Richard ? Et lorsque je lui répondais  que oui, elle concluait pour que je n’y trompe pas : « Il faut être heureux, c’est ce qui compte le plus! ». Non qu’elle fut malheureuse mais elle savait de quoi elle parlait ».

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

2 octobre 2017

L'Art de perdre de Alice Zeniter

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De l’Algérie je ne connaissais que sa date d’indépendance 1962, forcément l’année de ma naissance. Harkis, FLN, OAS etc oui j’en avais entendu parler mais sans savoir exactement qui était qui dans ces appellations.  L’Algérie ne faisant pas partie de l’histoire de mon pays la Belgique, je ne me souviens pas qu’on nous en aie parler durant mes études. Notre pays avait été le colonisateur du Congo car à l’époque c’était la mode et Leopold II n’avait pas désiré être moins que les autres.  Donc l’Algérie une inconnue. 

 

C’est ce mot Algérie qui m’a fait hésiter à lire ce roman. Bof l’Algérie. Déjà que les films genre Depardieu dans le désert ne m’ont  jamais inspirée. J’avais regardé un feuilleton dont je ne sais plus le titre mais abandonné au fil des épisodes. 

 

A lire les critiques et l’engouement pour ce roman, je devais sûrement passer à côté de quelque chose. 

 

Dès les premiers mots, je n’ai pas su m’arrêter. Ce qui m’a fracassé  c’est que tout est encore d’actualité. On traite les réfugiés de l’an 2000 tout comme on traitait les Harkis qui croyaient si fort en la bonté de cette France.

 

 

Alice Zeniter nous raconte l’histoire d’une famille dont Ali est le personnage principal.  Kabyle, né dans une région pauvre tentant d’obtenir une richesse du sol sec, il décide un jour d’aller se battre aux côtés des français en Europe. C’est là que le destin va décider de sa vie. Le maktoub comme aurait dit Ali.

 

La chance d’Ali, c’est qu’à son retour, allant se baigner avec ses frères, ils ont découvert un pressoir qui va lui permettre de changer de vie. Les voisins viendront lui confier leurs olives pour que coule ce divin nectar  doré : l’huile.

 

Il va se marier trois fois. La première femme ne lui donne que des filles. La seconde, aucun enfant donc répudiation. Et la troisième Yemna, lui donnera enfin ce fils qu’il désirait tant car son plus jeune frère est déjà père d’un garçon et il ne veut pas être floué. 

 

Son garçon portera le nom de Hamid et va débuter la vie heureux à courir dans le village et dans le collines. 

 

Malheureusement, bien souvent, d’autres invidividus décident pour vous de votre bonheur et désirent l’indépendance de leur pays l’Algérie. Le FLN descend au village pour que les habitants prêtent allégeance mais Ali ayant connu la guerre ne leur fait aucune confiance. 

 

Il va pactiser, si l’on peut appeler cela pactiser avec les français et en 1962, forcé de fuir avec femme et enfants et d’autres membres de la famille car il est menacé de mort. 

 

Il arrive en France en pensant qu’il est un citoyen comme les autres.  Pauvre Ali, il a de la chance qu’il a eu des places sur le bateau, car les Pieds Noirs passent avant eux.  D’habitation, il n’ont droit d’abord qu’à un camp de toiles à l’infini. Juste le droit d’accepter. On leur fait très vite comprendre qu’ils doivent être redevables à la France d’être aidés. 

 

Ensuite, on va les envoyer en Normandie, dans un camp de maisons. Ils vont travailler le bois, pas le choix d’un autre métier.

 

Pour se terminer dans ces HLM où on va les parquer.  Et Ali accepte. Lui le paysan devra travailler en usine et se contenter de ce petit appartement où l’on explique aux  femmes qu’elles doivent absolument le garder propre. On vous l’offre, donc vous êtes tenus d’en prendre soin. Surtout ne pas faire de vagues. Lui le Harki qui a combattu pour la France n’est aucunement considéré. 

 

Au vu de tout cela, Hamid, son fils ainé, décidera qu’il ne vivra pas comme eux à tout accepter.  Athé, il va épouser une française et deviendra le père de quatre filles. l’Algérie ne l’intéresse pas et il ne veut absolument pas en entendre parler. Là bas, avant leur fuite, il a vu des morts et ces morts il ne veut plus croiser leur chemin. 

 

Naima est l’une de ses filles. Elle travaille dans une galerie d’art, picole beaucoup, maitresse du propriétaire de la galerie. C’est ce dernier qui prononce le mot Algérie. 

 

 

« Elle ressent une  déception, brève et vive, qui se répétera souvent au long de son voyage, à la pensée que l’Algérie, en évoluant au fil des décennies, en se modernisant, s’est défaite de ce qui, pour Naima, aurait constitué un marqueur important, un des rares points de repère laissés par quelques récits élliptiques »

 

 

Elle voudrait comprendre pourquoi elle petite fille de Harki, elle est maudite par certains sur la toile.  Le silence d’Ali pèse sur ses épaules tout comme il a pesé sur celles de son père. Quel est son point d'attache avec ce pays de l'autre côté de la méditérranée ? 

 

 

 

J’arrête ici j’en en déjà trop dévoilé de ce roman.

 

 

Ce qui m’a heurtée en lisant, c’est ce mépris que la France avait pour ses anciens colonisés. Vous venez chez nous qui était chez eux également puisqu’ils avaient la nationalité française mais vous vous taisez, vous allez où on veut bien de vous. Et fermez-là.  Quelle honte ! 

 

De plus ne parlant pas le français ou si mal comment comprendre ce pays, comment communiquer ? Gràce au fils qui lui deviendra un vrai français dans vos rêves.  

 

 

Si je devais prononcer un mot après lecture du roman c’est tolérance l’un envers les autres. Derrière chaque visage se cache une histoire, des rêves. Et que les occidentaux cessent de croire que ce sont leurs rêves qui sont les plus beaux. 

 

Un roman coup de tonnerre. N'étant pas critique de livres, je ne sais que retranscrire mon ressenti. L'analyse structurelle et litteraire, est sûrement très basique mais j'ai l'espoir que vous le lisiez. 

 

« Ces colonnes qui partent venger croisent des colonnes de villageois qui partent, tout simplement, qui s’enfuient, sans but, sans rien, juste la panique. Si l’on pouvait trouver un point d’observation plus haut que les sommets des montagnes, on verrait que les versants de celles-ci sont parcourus en tous sens, on verrait des lignes mouvantes, une fourrière devenue folle »

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